jeudi 26 février 2009

Il est urgent de ne rien faire

Or doncques, l'idée est lancée de donner un droit de regard sur le contenu wikipédien à un petit groupe d'"élus" qui, de fait, ne le seront même pas vraiment. Je vendrai tout de suite ma conclusion en disant que cette idée est, à tout le moins, mauvaise pour le contenu, mauvaise pour les contributeurs, et mauvaise pour Wikipédia. Et elle est aussi totalement impraticable.

J'essplique.

S'arrêter n'est pas une bonne idée.

L'antienne à la mode depuis quelques temps déjà chez ses détracteurs semble être de pointer vers Wikipédia en disant "ah, regardez, il y a encore une erreur, Wikipédia est vraiment un danger pour la civilisation" (j'exagère à peine, après tout le sénateur Kennedy est mort pendant une seule minute). Plus inquiétant, la réponse wikipédienne est, dernièrement, déclinée sur le thème du "c'est vrai, désolés, on va essayer de faire mieux, en attendant diversifiez vos sources". Des accusations qui d'une part mettent la "communauté" sur la défensive et, en plus, la poussent à s'engager sur des promesses qu'elle ne pourra pas tenir. A la question "êtes vous aussi mauvais qu'on le dit?", la réponse est donc "oui.".

La validation des révisions revient, en substance, à transformer les contributeurs enregistrés en patrouilleurs RC. L'incitation à la participation, pour les anonymes, disparaît, puisque toute tentative de correction d'une erreur est soumise 1) à la présence d'un patrouilleur et 2) au fait que celui-ci ait le temps/les connaissances nécessaires pour confirmer que Brie-Comte-Robert a bien 15'000 habitants et pas 150'000. La gratification de faire quelque chose de positif (ce qui est quand même l'idée même du projet) et d'en voir le résultat de manière quasi-immédiate est niée. Le participatif tourne à la corvée, et n'est de toute façon plus si participatif que ça.

Du côté des contributeurs enregistrés, si leur finalité est d'emblée de jouer aux contrôleurs et de se comporter en petit chef, les seuls candidats restant, à moyen terme, seront des apprentis contrôleurs voulant jouer aux petits chefs. Pas des designers, codeurs, améliorateurs, ou contributeurs branchés Wikiconcours. Finie la progression du contenu, vu que les anonymes occasionels n'ont plus aucune incitation à participer pour autre chose que des typos, tandis que les contributeurs souhaitant un tant soit peu s'impliquer seront cantonnés à cliquer, cliquer, cliquer pour valider, valider, valider. Wikipédia, dès lors, n'a plus qu'à sédimenter de manière accélérée.

Face au danger de vandalismes en augmentation, il est donc essentiel de continuer à ne rien faire: ce n'est pas à Wikipédia à changer pour s'adapter aux gens, mais bien à ces derniers de comprendre qu'internet ça n'est pas la télé, où le cerveau est considéré comme disponible parce qu'en mode passif. Soyons honnêtes: ce ne sont pas les 800 ou 1'000 pingouins enregistrés depuis 2004 qui à eux seuls ont rédigé 800'000 articles.

On peut faire des effets de manche en rédigeant un billet dont chaque mot est lié à un vandalisme, mais ça ne change pas le fait que chacun de ces vandalismes a été révoqué, et certains par des IP. Au pire, cela montre que le système fonctionne et qu'il doit être renforcé, pas entravé. La réponse à la croissance inéluctable du lectorat est donc la croissance de la participation de ces mêmes lecteurs, pas sa restriction. En ce sens, la coloration en bleu du bouton "modifier", pour le rendre plus visible est, de loin, la meilleure idée des cinq dernières années1.

Et à la remarque "Il y a une erreur sur Wikipédia", la réponse naturelle doit être "Oui, et qu'avez-vous fait pour la corriger?"


1: Comme quoi les choses vraiment utiles au contenu ne sortent pas des Prises de décision.

lundi 23 février 2009

Semaine 8

Cette semaine sur le bulletin des admins: plutôt calme dans l'ensemble (deux jours sans nouveaux messages).

Les différentes tentatives d'une obscure agence israélienne de contrôler son image (et les évitables accusations d'antisémitisme qui vont avec le sujet) auront été les plus commentées (30 posts).

jeudi 19 février 2009

C'est pour votre bien

Il est malheureux qu'un énième accrochage insignifiant nous pousse à le faire, mais à quelque chose (petit) malheur est bon: la validation des révisions est enfin (et/ou à nouveau) sur la table. Wikipédia change, c'est une évidence, tout le concept encyclopédique 2.0 étant justement basé sur le fait que des millions de personnes qui en savent un peu parviendront à la longue à un meilleur résultat que quelques rares génies qui savent tout.

Mais, et c'est peut-être moins évident, ceux qui contribuent à Wikipédia changent aussi, tout comme ceux qui la consultent.

Alerte!

L'époque de la conquête de l'Ouest wikipédien est plus ou moins terminée: les liens rouges ne sont plus évidents, et les contributeurs qui faisaient partie de cette première vague de pionniers sont graduellement remplacés par des profils plus gestionnaires, plus techniques aussi: il ne s'agit plus tant de bleuir le lien pointant vers le Nigeria ou le Royaume-Uni que d'améliorer les infobox y relatives, de remplir les tableaux d'évaluation en page de discussion, et s'assurer que le contenu ne se dégrade pas. De nouvelles règles se sont mises en place, des us et coutumes aussi, un sens communautaire surtout, qui fait que beaucoup de Wikipédiens se définissent par une opposition entre "eux" et "nous". Sauf qu'il est pour "eux" de plus en plus difficile de s'intégrer à "nous", parce qu'entre autres la méconnaissance parfois naïve des usages n'est pas toujours vue avec la mansuétude qu'il faudrait.

L'audience de Wikipédia a également évolué: d'une masse d'anonymes ayant pris connaissance du projet parce qu'ils sont plus ouverts sur les nouvelles technologies (et y ayant plus facilement accès), et donc peut-être aussi plus sensibles à l'idée de construction d'un projet encyclopédique auquel ils avaient les moyens intellectuels de participer, le succès wikipédien l'a aussi ouvert aux masses tout court. Et il n'y pas besoin d'être un intellectuel parisien pour parfois penser que parmi ces masses on a quand même une sacré proportion d'adolescents boutonneux, cas sociaux, personnes avec un agenda politique/pseudoscientifique/non-neutre à avancer et/ou un mal de reconnaissance. Wikipédia, pour une population vivant depuis 30 ans dans la glorification du quart d'heure de gloire, est le moyen direct d'accession à la Terre promise. Il n'y a qu'à regarder le nombre d'autobiographies et de pages publicitaires qui apparaissent, toujours plus nombreuses.

Bref, moins (ou autant, mais visiblement pas plus) de Wikipédiens, alors que le nombre de vandales, illuminés et autres passagers clandestins à surveiller et contrecarrer augmente. Les temps ont changé. Le nier, c'est se mettre la tête dans le sable avec panache, mais dans le sable quand même. La glorieuse et insouciante époque du free-for-all doit cesser.

mardi 17 février 2009

Coup de vieux

J'ignore si c'est pareil pour tout le monde, mais il m'arrive de traverser des périodes où je m'acharne sur une seule et même thématique wikipédienne. Ainsi, pendant ma première année sur le projet (2005), je tirais une certaine fierté de ce que le nombre d'articles à recycler ne dépassait jamais les 100. Et puis je suis allé faire autre chose.

Je viens d'y repasser, pour découvrir que la catégorie regroupe désormais 2'183 2'182 2'181 2'182 pages et 9 sous-catégories. Ouch.

samedi 14 février 2009

Je suis contre

A ma gauche, quelqu'un qui "participe" au projet wikipédien en tenant essentiellement salon, comme on l'a très justement remarqué. Avec 16% de contributions dans l'espace encyclopédique et presque 77% réparties entre les divers espaces de discussion, je crois qu'on ne peut pas mieux le décrire: juste assez pour être toléré dans le club, mais pas assez pour y être pris au sérieux quand il s'agit de mouiller sa chemise et obtenir quelque responsabilité en retour.

C'est, me semble-t-il, une évidence que poser sa candidature pour le statut d'administrateur dans ces conditions revient vraiment à prendre les gens pour plus sots qu'ils ne sont, leur expliquant en somme qu'à force de donner un avis non sollicité on obtient une expérience encyclopédique permettant d'étendre cet avis sur plein d'autres choses, avec les boutons de suppression et (dé)blocage qui vont bien avec. La logique m'échappe, mais soit: c'est aussi celui qui dit qui l'est (sot).

A ma droite ceux qui, fort justement, n'apprécient pas la démarche à sa juste valeur dadaïste. Le rejet est large et, à défaut d'être unanime, représente un splendide exemple de ce qui peut constituer un consensus.

Qu'est-ce qui, dès lors, justifie la poursuite de ce cirque? Une fois l'échec de la candidature avéré qu'est-ce qui, outre le besoin de donner une bonne leçon, justifie qu'on laisse l'impétrant constater chaque jour un nouveau signe du rejet que sa candidature suscite? Certes, c'est déjà là sa troisième tentative: on peut difficilement arguer la candeur et s'il y a victime, ce n'est que de lui-même. Sauf que le propos du projet n'est pas de faire l'éducation des gens - en tout cas pas l'éducation sociale d'éléments en mal de socialisation.

Lui permettre de dresser une liste la plus exhaustive possible des gens qui ne l'apprécient pas ou n'apprécient pas sa démarche, le laissant au besoin réagir de manière suffisamment agressive pour qu'on puisse justifier d'un blocage toujours plus long et avoir ainsi la possibilité de l'éjecter pour de bon sont certes des perspectives intéressantes mais, je le répète, pas du domaine d'un projet encyclopédique. Dès lors, la non-élection étant assurée après à peine 48h je ne comprends pas l'intérêt d'une continuation pour douze autres jours - et je comprends encore moins qu'on puisse l'exiger comme un droit et devoir - sauf à considérer comme un devoir le fait de donner des leçons de morale en enfonçant le nez des gens dans leur caca. Bof.

HMO n'étant pas un vandale, j'ignore en quoi tout cela améliorera quoi que ce soit sur l'encyclopédie. Mais il semble parfois que le bon sens, quand il s'oppose à une lecture moraliste des règles, soit considéré comme malvenu. Dont acte.

jeudi 12 février 2009

Monsieur Boubaker, vous m'emmerdez

Je crois que je viens de remplir la proposition de suppression la plus compliquée depuis que je suis sur Wikipédia. La procédure anglophone, avec ses trois modèles à apposer et son mode d'emploi simple mais long, est à mon avis destinée à s'assurer que le proposant soit vraiment motivé pour qu'un article disparaisse. Ce qui tombe bien, puisque je l'étais.

Les désormais célébrissimes Polynômes de Boubaker sont donc partis pour disputer la belle, avec une 3e proposition de suppression chez les anglophones (nous en sommes pour l'instant à 1 partout là-bas, mais 28 à 0 sur tous les autres wikis). Soyons honnêtes, ce n'est que pure vengeance - je contribue à :en de manière totalement marginale, et en ce qui concerne les maths j'ai déjà des problèmes pour suivre Des chiffres et des lettres. Je ne connais pas non plus M.Boubaker (apparemment décédé, qui plus est), ni ses amis les poupées-chaussettes (en tête desquels selon toute probabilité son ancien bras droit Karem B.), pas plus que je ne remets en cause la solidité de ses résultats.

Ce qui m'embête, c'est que depuis plus d'un an déjà M.Boubaker et son orchestre s'adonnent au spam autopromotionnel, à la référence circulaire, à la pression, aux menaces et au mensonge. Une équipe scientifique qui se livre à ce genre d'activités, vous m'excuserez, est une équipe dont je pense pouvoir remettre raisonnablement en cause l'éthique scientifique et dont les travaux doivent être sujet à caution (a fortiori dans un projet grand public). Accessoirement, la 9e place occupée dans mon classement personnel des gens pas nets1 ne me paraît depuis quelques jours pas rendre justice à son (leur) acharnement.

Bref. Peut-être que l'article sera conservé, peut-être pas - ça n'a pas une grande importance, personne n'ira le lire selon toute probabilité: l'important est d'avoir fait quelque chose, et si brasser un peu d'air peut exposer cette équipe pour ce qu'elle est, ce n'est pas plus mal.


1. Personne ne s'est étonné d'y constater l'absence de Vdrpatrice, probablement parce que tout le monde l'aura, comme moi, trouvé hors-catégorie.

mardi 10 février 2009

Huit heures et trente-sept minutes

...c'est le temps écoulé entre la révélation d'un énième canular sur Wikipédia et son nettoyage intégral. Plus le blocage des comptes coupables.

Résumé de l'affaire: en novembre 2007, un contributeur crée l'entrée sur Bernard Galand - auteur au succès modeste et plutôt ancien. La page est, en 2008, rarement consultée plus d'une fois par jour. En fait, vu le nombre de sites miroirs maintenus par des robots, j'ai l'impression que ce visiteur quotidien n'est pas le plus humain qui soit.

Création de Tux Factory par Brunoch http://tux.crystalxp.net/en.id.5975-brunocb-sherlock-holmes-tux.htmlFévrier 2009: une IP signant Patevoma inscrit dans l'article que ce n'est qu'un gigantesque canular, ah ah, qu'il représente un collectif et que démonstration est faite que n'importe qui peut écrire n'importe quoi sur Wikipédia.

N'importe qui peut écrire n'importe quoi sur Wikipédia.

C'est abyssal. N'importe qui peut, en général, écrire n'importe quoi sur Internet - ça ne remet pas en cause l'outil, mais bien l'absence totale d'esprit critique que pouvaient avoir les gens avant que Wikipédia n'arrive. Créer un article que personne n'ira lire, pour ensuite dire que sa survivance est un échec collectif des administrateurs1, c'est une manière pas particulièrement pertinente de revendiquer la supériorité du mandarinat contre le collectif - si les Hautes Autorités ne sont pas là pour dire le vrai du faux, c'est à n'en pas douter la fin de la civilisation occidentale car n'importe qui pourrait dire n'importe quoi. Un peu comme si M.Elkabbach tuait Pascal Sevran par anticipation, ou comme si le New York Times nous avait vendu la guerre en Irak et se rendait compte de son erreur un an plus tard.

Oups.

Ce que je relève, c'est que moins d'une minute après l'ajout dénonciateur, celui-ci était révoqué. Sept minutes et un mot est laissé sur le Bulletin des Admins. Une demi-heure et l'article est nettoyé, des références ajoutées(!). Quelques heures de plus, l'article est complètement nettoyé et une vérification d'IP lancée2. Trente minutes après que celle-ci soit tombée, quatre comptes (dont deux n'avaient pas eu l'amabilité de se dévoiler) sont bloqués. Affaire classée.

Entre les éditions sur l'article, sa page de discussion, le BA et la requête de check-user, ce sont environ 40 éditions en huit heures pour les admins, qui demain auront pour l'essentiel oublié cette histoire. L'IP blagueuse y aura consacré presque 50 éditions sur un an et demi.

Nous sommes des volontaires, travaillant de concert alors que nous sommes séparés par des centaines de kilomètres. Nous gérons l'un des dix sites les plus visités au monde. Une bonne âme vient de nous démontrer qu'on trouve de tout sur Internet, et pas mal de n'importe quoi que personne ne lit. Qu'il retourne donc dans les années 1990, où l'on pouvait prétendre sans rire qu'Internet représentait la défaite de la pensée; personnellement je trouve qu'on se débrouille plutôt pas mal, pour des gueux.



1. Je peux aussi me promener nu dans ma cage d'escalier à trois heures du matin, ça ne remet pas particulièrement en cause le travail de ma concierge.
2. Entre les deux, des copains sont passés boire un verre. Je me voyais mal leur dire "Commencez sans moi, il faut absolument que je finisse de nettoyer cet article que personne ne lit."

lundi 9 février 2009

Comment devenir admin

Deux candidatures au poste d'administrateur sur la Wikipédia francophone sont sur le point de s'achever. Il semble d'ores et déjà que l'on s'achemine vers au moins un rejet, voire deux.

C'est dommage.

En fouillant un peu, on s'aperçoit que le processus d'élection des admins s'est au cours des années complexifié de manière impressionnante, jusqu'à devenir l'audition sénatoriale que l'on observe de nos jours. En 2002, il suffisait de s'inscrire sur la liste de diffusion et demander, Jimmy Wales décidant selon son bon vouloir.

En 2003, c'est plus une discussion qu'un vote, mais ca commence à en prendre la forme, on se dit que ca ne fait pas très sérieux d'avoir des sorties comme celle-ci:
"Bonsoir,
Si vous cherchez un sysop, je veux bien remplir ce rôle. En fait, c'est surtout pour supprimer des pages orphelines (typo, etc.) qui traînent. Et aider si besoin ait. Yann 23:53 fév 15, 2003 (CET)

- Pas de nouvelles ? Yann 16:39 fév 18, 2003 (CET) [<- Notez la question trois jours plus tard]

- Je suis pour te voir nous rejoindre. J'en ai touché un mot à Brion qui s'occupe de cela. On a besoin de plus d'effectifs. --youssef 18:20 fév 18, 2003 (CET) [réponse après encore deux heures]
PS:A moins qu'il y'ait des opositions. Brion te baptiseras normalement adminsitrateur avant lundi. Il est peut-etre un peu occupé. --youssef 19:13 fév 18, 2003 (CET) [<- genre "s'cuse, on a d'autres trucs plus importants à faire": le 18 février 2003 était un mardi]
(Yann élu avec 100% des une voix exprimée(s)).

En 2004, on rentre en territoire connu, Céréales Killer fait une courte lettre de motivation et les votants s'expriment par liste à puce. Il est élu avec un raz-de-marée de 15 votants sur 15 (dont CK lui-même). C'est d'ailleurs à l'élection suivante (la première de 2004 en fait), que se formalise la répartition pour/contre. Et c'est en 2004 aussi qu'on a le premier rejet:
"Je voudrais devine admin pour terminé (assasiné) les vandals comme papotages et micheal. (J'ai plus active au wikipedia anglais.) Merci pour le consideration!"
(8 contre et 1 neutre).

Ce format laïus+sections pour/contre/neutre est, on le voit, officialisé assez tôt et est toujours en pratique aujourd'hui1. Les choses n'ont pas vraiment évolué depuis: pour preuve, la première élection au statut de bureaucrate en 2005, a toutes les apparences d'une élection comme nous les connaissons. Il y avait d'autres bureaucrates avant celle-ci, mais il semble que ça faisait pour ceux-ci plus ou moins partie d'un package avec le statut de sysop - j'ignore ce qui a pu provoquer la séparation de l'adjudication simultanée des droits, ou si les élections sont trop anciennes pour avoir survécu au changement de base de données.

Bon, tout ça c'était donc pour la forme des élections. Prochain épisode: le fond (et surtout les arguments).



1. Une espèce de Prise de Décision fin 2005 a permis de décider de ne rien décider, sinon que l'élection se ferait à l'ultra-majorité (>75%). La section "réticences" n'apparaît pas pour sa part avant octobre 2006 (en même temps que le veto et le pouvoir discrétionnaire des bureaucrates, à vrai dire).

vendredi 6 février 2009

Wordle

Début février sur le Bulletin des administrateurs...


EDIT: J'ai enlevé la plupart des conjonctions et articles, et pris la semaine entière. Je crois que je vais en faire un thème régulier.

jeudi 5 février 2009

Cinq contre Un

Wikipédia en anglais c'est vachement mieux, car c'est bien connu qu'une accumulation de n'importe quoi nous permettra, in fine, d'y trouver absolument tout. Aux autres ensuites de se débrouiller pour financer, ordonner, et maintenir cette méta-encyclopédie - c'est un autre problème.

Autant dire qu'avec ce genre de raccourcis la marmotte elle n'a pas fini d'emballer du chocolat.

La carte que vous voyez à droite indique les pays de l'OCDE, et parmi ceux-là lesquels ont pour langue officielle l'anglais (rouge) ou le français (bleu). Pourquoi juste l'OCDE? Parce qu'en dépit de tous les chiffres sur l'accès à internet dans le monde (oh-la-la-c'est-formidable-même-les-pauvres-y-ont-droit), c'est bien la seule zone où non seulement les gens peuvent surfer mais en plus y créer une valeur ajoutée sur leur temps libre (comprenez qu'ils ont des loisirs et un niveau d'éducation élevé). Bonus: les taux d'accès sont vaguement homogènes. C'est sur cette base que j'ai commencé à additionner les chiffres de population pour chacun des ensembles, francophone et anglophone.

Que nous donne ce calcul de comptoir? Un total de 79'150'000 personnes d'un côté (nous) et 397'930'000 de l'autre (eux). Soit, à la louche, cinq anglois pour un seul françois.

Si maintenant on comptabilise le nombre d'articles disponibles sur chaque projet, nous avons à ce jour 2'726'000 articles sur :en contre 761'000 sur :fr. Soit... trois et demi contre un. Plutôt étonnant, surtout si l'on pense à tous ces non-anglophones qui contribuent pourtant en anglais. Si d'aventure nous poussions l'expérience jusqu'à regarder du côté de nos cousins les Germains, le ratio tomberait à trois articles sur :en pour un seul sur :de (pour un bassin de population quatre fois supérieur).

Soit aussi, et c'est encore plus parlant, un article pour 146 (:en), 104 (:fr) et 110 (:de) locuteurs.

La conclusion de ce petit exercice est qu'en dehors de tout débat philosophique, on a surtout l'encyclopédie collaborative que sa démographie permet. Et si l'on cherche à pointer ceux qui accumulent les articles plus vite que leur ombre, on ne regardera pas forcément du bon côté en allant vers le plus gros projet.

mercredi 4 février 2009

On nous observe

Ceux d'entre nous qui, après avoir contribué sur Wikipédia, aiment à feuilleter un peu de littérature scientifique à propos de Wikipédia (plutôt que lire un Wikilivre ou s'informer sur Wikinews), n'auront pas manqué de consulter cet article élégamment intitulé "Ne regardez pas, mais nous avons créé une bureaucratie: nature et rôle des règles sur Wikipédia"1.

Or doncques, il semble qu'on nous observe. J'y songeais ce matin encore lorsque les Voix que j'ai dans la tête m'ont indiqué où j'avais rangé mes clefs, mais nous en avons désormais la confirmation (des fois aussi que les presque 500 autres articles scientifiques parus dans les 7 dernières années nous aient laissé comme un doute). Bien.

Les auteurs avancent dans leur papier plusieurs idées très vraies, à savoir que sur WP comme ailleurs différentes règles répondent à différents propos pas forcément interdépendants, notamment:
  • rationaliser et coordonner;
  • construire une identité wikipédienne;
  • répondre à des signaux externes ou internes (genre un "scandale" sur une biographie de personne vivante);
  • résoudre des conflits;
  • établir des mécanismes de contrôle.
Et d'illustrer chacun de ces points (et d'autres) par des règles spécifiques. Ce qui est intéressant, en fait, c'est que pratiquement tout l'éventail de justifications de ces règles est couvert et mis en pratique, et que d'un espace peu peuplé au départ on finit avec un assemblage complexe sans qu'il y ait eu de démarche volontaire dans ce sens (il n'y a pas de "Projet:règlements" dont le but serait de codifier les pratiques).

Autre élément d'intérêt: toutes ces règles ont une vie qui leur est propre, et aucune n'est véritablement définitive dans sa forme. C'est ainsi qu'ils arrivent à l'amusante constatation que Ignore all rules (soit "De l'interprétation créative des règles", en bon français) a diminué de 9 mots en 5 ans... mais a gagné une annexe en contenant 579, soit 3600% de croissance effective2. Les chiffres sont similaires pour les autres principes de base que sont Consensus (1557%), Copyrights (938%) et What Wikipedia is not (929%), pour n'en citer que quelques uns.

Bon, en fait je pourrais reprendre chacun des paragraphes du papier tellement dans l'ensemble ils ont vu juste, entre autre sur le fait que la création ou l'évolution d'une règle peut être vue comme une compétition entre plusieurs positions concurrentes. Du coup je vous laisse lire et en profiter. Pour moi la plus intéressante de leurs suggestions est celle que toutes ces règles qui apparaissent, se développent jusqu'à saturer ou recouvrir l'entier d'un sujet et (parfois) devenir obsolètes, ne sont pas là pour structurer un projet dans son ensemble mais simplement pour en organiser localement différentes facettes, celles-ci n'étant pas forcément liées. En clair: les règles ne sont que la manifestation du fait que Wikipédia est un écosystème, une organisation vivante et multiple, une confédération d'apparence chaotique mais dans les faits de plus en plus organisée aux niveaux où cela importe.

Je n'ai jamais accordé à mes cours de sociologie l'intérêt qu'ils méritaient. Je le regrette.


1. "Don't look now, but we've created a bureaucracy: The nature and roles of policies and rules in Wikipedia", B. Butler, E. Joyce, J. Pike, Conference on Human Factors in Computing Systems - Proceedings, 2009, pp. 1101-1110.
2.Les 52 révisions sur les 30 derniers mois ont déjà permis à la version francophone de croître de 920% (de 68 à 630 mots). Je gage que ce n'est qu'un début.